
Jeudi 07 Août 2025 à 10h30 par EKKOFIN
Valorisation express : Guide pratique
Valorisation express : guide pratique
La valorisation d’une société peut souvent sembler un processus complexe et fastidieux. En effet, il existe de nombreux paramètres à prendre en compte tels que la performance financière, les perspectives de croissance, les caractéristiques du secteur d’activité et les risques spécifiques à l’entreprise.
Cette complexité peut souvent décourager les dirigeants de petites et moyennes entreprises (PME), qui estiment que seul un expert peut s’acquitter de cette tâche. Pourtant, il est possible d’obtenir une estimation rapide pouvant fournir une valeur indicative d’une société en utilisant une méthode éprouvée, simple et accessibles à tous.
Pour ce faire, l’analyse des comptes annuels des sociétés publiés sur la Banque Nationale de Belgique (BNB) offre une source d’information fiable et transparente. En exploitant ces données, il est possible de mettre en place une approche systématique qui permet d’obtenir une estimation de la valeur d’une société en quelques minutes. Bien que ces estimations ne valent pas une analyse approfondie réalisée par des spécialistes, elles peuvent offrir un aperçu utile, notamment pour des premières discussions lors de négociations ou pour évaluer le potentiel d’une opportunité de rachat par exemple. Dans cet article, nous allons vous montrer comment obtenir une valeur indicative pour une société de manière efficace et rapide en se basant sur ces comptes annuels publics.
Étape 1 : Déterminer l'EBITDA annuel
La première étape pour effectuer une valorisation rapide est de déterminer l’EBITDA annuel. Cet EBITDA constitue un indicateur clé car il permet d’évaluer la performance opérationnelle de l’entreprise sans tenir compte des décisions de financement, de politique fiscale et d’amortissement.
Pour ce faire, commencez par prendre le résultat d’exploitation de l’année (Code 9901), auquel vous ajoutez les amortissements (Code 630), les réductions de valeur (Code 631/4) et les provisions (Code 635/8). Cela permet de mesurer la capacité de l’entreprise à générer des profits à partir de ses activités principales, indépendamment des variables externes.
Il est important de noter que l’EBITDA peut varier d’une année à l’autre en raison de fluctuations liées à des événements exceptionnels, des cycles économiques ou des changements internes dans l’entreprise. Pour lisser ces variations et obtenir une estimation plus fiable, il est conseillé de calculer la moyenne de l’EBITDA sur les deux, trois, voire quatre dernières années. Cette approche permet d’obtenir un EBITDA « lissé », plus représentatif de la performance réelle de l’entreprise sur une période donnée en évitant les effets des événements exceptionnels qui pourraient biaiser l’analyse. En utilisant un EBITDA lissé, on s’assure de refléter la véritable capacité de l’entreprise à générer des bénéfices opérationnels de manière régulière et durable.
Enfin, il est également utile de comparer l’EBITDA de l’entreprise avec les moyennes sectorielles afin de mieux contextualiser la performance de la société par rapport à ses concurrents. Une telle comparaison peut fournir des informations précieuses sur la compétitivité de l’entreprise et sur sa position relative dans le marché. Cela aide à déterminer si l’entreprise surperforme ou sous-performe par rapport à d’autres acteurs similaires, ce qui peut influencer le coefficient multiplicateur utilisé dans les étapes ultérieures de la valorisation.
Étape 2 : Éliminer les éléments exceptionnels
Il arrive parfois que certaines années présentent des revenus ou des charges exceptionnels qui ne sont pas récurrents. Ces éléments peuvent fausser l’EBITDA en donnant une image inexacte de la performance financière de l’entreprise.
Par exemple, une vente d’actif non courant ou une charge juridique ponctuelle pourrait gonfler ou réduire artificiellement l’EBITDA. Il est donc essentiel d’identifier et d’éliminer ces éléments exceptionnels pour obtenir une vision plus réaliste de la capacité de l’entreprise à générer des bénéfices.
Pour corriger cela, il convient d’ajouter les charges exceptionnelles (66A) et de soustraire les revenus exceptionnels (76A). Les charges exceptionnelles incluent des coûts tels que par exemple des indemnités de licenciement ou des pertes résultant de sinistres non récurrents. Quant aux revenus exceptionnels, ceux-ci peuvent provenir de sources inhabituelles, comme par exemple la vente d’une propriété ou d’une autre forme d’actif non lié à l’activité courante de l’entreprise. En procédant de cette manière, vous obtenez un EBITDA « normalisé » débarrassé des éléments non récurrents, offrant une meilleure estimation de la rentabilité opérationnelle de l’entreprise.
L’objectif est de rendre l’EBITDA le plus représentatif possible des performances récurrentes de l’entreprise afin de fournir une base solide pour la valorisation. En effet, la prise en compte d’éléments exceptionnels peut souvent masquer la performance réelle et une valorisation basée sur un EBITDA non ajusté risque d’être erronée, conduisant à une surévaluation ou une sous-évaluation de l’entreprise. Une bonne identification et un retrait approprié de ces éléments sont donc indispensables pour arriver à une valorisation précise et fiable.
Étape 3 : Appliquer un coefficient multiplicateur
Une fois que vous avez l’EBITDA « normalisé », vous pouvez lui appliquer un coefficient multiplicateur pour obtenir la valeur d’entreprise. Ce coefficient, souvent appelé le « Multiple d’EBITDA », est déterminé en fonction de plusieurs facteurs tels que les conditions du marché, le secteur d’activité, la taille de l’entreprise, son niveau de structuration ainsi que ses perspectives de croissance. Ce coefficient varie généralement entre x4 et x6 mais peut être plus élevé dans des secteurs à forte croissance ou pour des entreprises présentant un profil de risque faible et des perspectives très prometteuses.
Pour une estimation rapide, il est courant de prendre une moyenne à x5. Multipliez l’EBITDA moyen des dernières années par ce coefficient pour obtenir la valeur de l’activité opérationnelle de l’entreprise. Toutefois, il est important de comprendre que le choix du multiplicateur n’est pas arbitraire. Il doit être ajusté en fonction des spécificités de l’entreprise et du secteur dans lequel elle évolue.
De plus, il est pertinent de s’appuyer sur des comparables de marché pour affiner le choix du coefficient multiplicateur. Les transactions récentes dans le même secteur d’activité ou pour des entreprises de taille similaire peuvent fournir une indication précieuse sur les multiples actuellement utilisés par le marché. Ces données comparatives aident à s’assurer que l’estimation est réaliste par rapport aux valeurs observées dans des transactions comparables.
Enfin, l’application du coefficient multiplicateur doit également prendre en compte les perspectives de croissance future de l’entreprise. Si une entreprise a des opportunités de croissance importantes, comme des nouveaux contrats en cours de signature ou un potentiel d’expansion géographique, cela pourrait justifier un multiple plus élevé. Inversement, si l’entreprise est confrontée à des défis importants, tels qu’une concurrence accrue ou des incertitudes économiques, le multiple devra être ajusté à la baisse pour refléter ces risques.
En somme, l’application du coefficient multiplicateur à l’EBITDA « normalisé » est une étape cruciale dans la valorisation d’une société. Elle permet d’estimer la valeur de l’activité opérationnelle de manière pragmatique tout en tenant compte des dynamiques de marché et des caractéristiques spécifiques de l’entreprise. Une bonne compréhension de ces multiples et de leur utilisation permet de parvenir à une valorisation plus précise et plus en phase avec la réalité économique de l’entreprise.
Étape 4 : Ajuster de la dette nette
Pour affiner la valorisation, il est nécessaire d’ajuster la valeur opérationnelle obtenue en prenant en compte la structure financière de l’entreprise, symbolisée par la « dette nette » dans le cadre des calculs de valorisation. Tout d’abord, il convient de déduire les dettes financières à long terme (Codes 172/3 et 174/0) et court terme (Codes 42, 43 et 47/48). Ces dettes incluent les emprunts bancaires, les obligations ainsi que tout autre passif financier que l’entreprise doit rembourser.
Ensuite, il est important d’ajouter les placements de trésorerie (Code 50/53) et les valeurs disponibles (Code 54/58). Ces actifs comprennent les liquidités, les placements à court terme et les réserves de trésorerie qui peuvent être immédiatement mobilisés. Ces éléments augmentent la valeur de l’entreprise car ils représentent des ressources financières disponibles qui pourraient être utilisées pour des investissements futurs, le remboursement de dettes ou même la distribution aux actionnaires.
Il est important également de préciser que d’autres actifs non opérationnels, qui pourraient ne pas être directement liés aux activités courantes de l’entreprise mais qui ont tout de même une valeur significative, sont difficilement chiffrables sans une connaissance pointue de la société à valoriser. Par exemple, des terrains ou des bâtiments excédentaires, des parts dans d’autres entreprises ou des actifs financiers non liés à l’exploitation principale peuvent également être ajoutés à la valorisation. Ces actifs peuvent considérablement augmenter la valeur totale de l’entreprise, surtout s’ils sont sous-évalués dans les états financiers.
En procédant à ces ajustements, vous obtenez une estimation plus précise de la « valeur des actions » de l’entreprise, aussi appelée « valeur des fonds propres ». Cette valeur représente ce qui reviendrait aux actionnaires sur base de la valeur opérationnelle de la société, diminuée de sa dette nette. Ces étapes sont cruciales pour s’assurer que la valorisation reflète non seulement la capacité opérationnelle de l’entreprise mais également sa situation financière globale, y compris les ressources disponibles et les obligations financières à respecter.
Ces ajustements permettent ainsi d’obtenir une valorisation plus complète, offrant une meilleure base pour toute transaction éventuelle, qu’il s’agisse de cession, d’acquisition ou encore de levée de fonds. La valorisation finale prend donc en compte non seulement les performances opérationnelles mais aussi la situation financière et offre une vision équilibrée et réaliste de la valeur économique de l’entreprise.
Les limites de la « valorisation express »
Il est crucial de comprendre que cette méthode fournit une valorisation très préalable. Elle ne prend pas en compte des facteurs essentiels tels que la maturité de l’entreprise, son degré de structuration ou les risques opérationnels et financiers spécifiques.
Par exemple, une entreprise jeune qui est encore en phase de croissance pourrait présenter des risques plus élevés en raison de son manque de stabilité, ce qui devrait être pris en compte dans une valorisation plus détaillée. De même, une entreprise bien structurée avec des processus en place et une gouvernance solide aura une valeur différente par rapport à une entreprise moins organisée et structurée.
Les risques opérationnels tels que la dépendance au(x) dirigeant(s), les fluctuations des coûts des matières premières ou de l’énergie ou encore les risques liés à la chaîne d’approvisionnement sont autant d’éléments qui peuvent avoir un impact majeur sur la valeur de l’entreprise. Ces risques, s’ils ne sont pas évalués, peuvent biaiser l’estimation de la valeur et entraîner une mauvaise interprétation de la situation réelle de l’entreprise. Une analyse approfondie inclurait une évaluation de ces risques ainsi que des tests de résilience pour déterminer comment l’entreprise pourrait réagir face à différents scénarios économiques.
De plus, les aspects qualitatifs tels que la réputation de l’entreprise, la satisfaction des employés, la fidélité des clients et la capacité d’innovation sont également des facteurs critiques qui ne sont pas pris en compte dans cette méthode rapide de valorisation. Ces éléments peuvent également avoir une influence importante sur la pérennité et le potentiel de croissance de l’entreprise et, par conséquent, sur sa valeur réelle. Par exemple, une entreprise jouissant d’une bonne réputation dans son secteur est susceptible d’attirer plus facilement des clients et des partenaires, ce qui peut contribuer à sa croissance future. Cet aspect sera très complexe, voire impossible à chiffrer.
Pour une analyse plus détaillée et une valorisation plus fiable, il est donc indispensable de mener une étude approfondie de l’entreprise. Cette étude inclut des analyses financières avancées, des entretiens avec les dirigeants, une étude de marché ainsi qu’une évaluation des risques spécifiques à l’entreprise. Une telle analyse permet de mieux comprendre les forces et les faiblesses de l’entreprise, d’identifier les opportunités et les menaces potentielles et de fournir une estimation de valeur qui soit à la fois réaliste et utilisable pour la prise de décision stratégique. Une analyse de valorisation très rigoureuse est donc essentielle pour des négociations complexes telles que des levées de fonds, des acquisitions ou des partenariats stratégiques.
Conclusion
Valoriser une société en quelques minutes est possible grâce à une méthode structurée et rapide. En suivant les étapes décrites – déterminer l’EBITDA, éliminer les éléments exceptionnels, appliquer un coefficient multiplicateur et ajuster par la dette nette – vous pouvez obtenir une estimation préliminaire utile. Cette méthode offre un point de départ précieux, que ce soit pour envisager une acquisition, une cession ou simplement pour mieux comprendre la valeur d’une entreprise.
Cependant, il est essentiel de garder à l’esprit que cette approche rapide ne remplace en aucun cas une analyse de valorisation approfondie. Pour obtenir une valorisation solide et utilisable dans un contexte d’opérations financières, de négociations avec des investisseurs ou de discussions avec des partenaires, une étude détaillée est nécessaire. Celle-ci doit inclure une évaluation des aspects qualitatifs, une analyse des risques ainsi qu’une prise en compte des dynamiques spécifiques du secteur et des conditions économiques globales. Cela permet de compléter la valorisation préliminaire et d’en faire un outil réellement stratégique et fiable.
Essayez cette méthode chez vous pour mieux comprendre la valeur de votre entreprise ou d’une société cible. C’est un exercice enrichissant et instructif qui vous aidera à acquérir une meilleure compréhension des fondamentaux de la valorisation. Cela pourra également vous permettre d’identifier des domaines d’amélioration potentiels au sein de votre propre entreprise et ainsi d’en accroître la valeur sur le long terme.
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