Le gouvernement veut laisser une chance à un partenaire européen

Le gouvernement français s'oppose à des négociations exclusives entre l'opérateur Orange et le groupe hongkongais PCCW, pour l'acquisition de 49% de la plateforme de vidéos Dailymotion, pépite du numérique français, voulant laisser le temps à un partenaire européen de se manifester.

Orange, qui contrôle Dailymotion depuis 2012, cherche activement un partenaire en mesure de financer la croissance de cette plateforme de vidéos en ligne, rivale de Youtube, et d'assurer son développement hors d'Europe.

Mais ses tentatives de rapprochement se sont heurtées mercredi aux objections du ministre de l'Economie et de l'Industrie Emmanuel Macron, après le veto en 2013 de son prédécesseur Arnaud Montebourg, ancien ministre du Redressement productif, à un projet de rachat par le groupe américain Yahoo!.

"Il ne peut pas y avoir de négociations exclusives. Il est nécessaire que toutes les options (sur la table) puissent être examinées en prenant en compte l'enjeu de souveraineté européenne", a affirmé à l'AFP une source du ministère de l'Economie, confirmant une information du journal Le Monde.

L'idée serait de chercher à créer un acteur européen face au grand leader mondial Youtube.

"On allait vers des négociations exclusives (pour la cession de 49% de Dailymotion) avec PCCW, elles ont été suspendues le temps que Fimalac puisse faire une offre", a indiqué à l'AFP une source proche du dossier, tout en précisant qu'aucune proposition formelle n'a encore été transmise par le groupe de Marc Ladreit de Lacharrière.

Cette source est venue confirmer des informations du Monde, selon lesquelles Fimalac serait sur les rangs pour une participation dans Dailymotion, évoquant aussi l'intérêt des groupes allemands Axel Springer et Bertelsmann, et de Vivendi.

Le groupe français Fimalac a fortement renforcé son pôle médias numérique Webedia ces derniers mois à coup d'acquisitions de sites thématiques (Allociné, 750g, jeuxvideo.com, Purepeople...), tandis que Vivendi a déjà mené des négociations par l'intermédiaire de sa filiale Canal+ pour une prise de participation qui avaient échoué.

Contacté par l'AFP, le groupe PCCW n'a pas souhaité apporter de commentaire.

-- Indépendance de la gouvernance --

Orange a répété de son côté "ne pas être hostile à l'entrée d'un partenaire stratégique pour accompagner et accélérer le développement de Dailymotion" mais a précisé que le groupe "n'était pas en négociations exclusives avec qui que ce soit".

Orange, dont l'Etat français détient un quart du capital, a souligné que toute décision serait prise par son conseil d'administration, façon de rappeler l'indépendance de sa gouvernance.

Le groupe PCCW, présent dans les télécoms, les médias et d'autres secteurs et dirigé par Richard Li est "un acteur puissant qui peut nous donner un accès au marché chinois", avait relevé le PDG d'Orange Stéphane Richard à la mi-mars.

Le père de Richard Li, le milliardaire chinois Li Ka-shing est à la tête de l'opérateur Hutchison Whampoa qui a de fortes ambitions en Europe. Il a racheté l'opérateur O2 le mois dernier au Royaume-Uni où il détenait déjà son concurrent Three.

Stéphane Richard avait fait en novembre un déplacement en Asie où il avait rencontré plusieurs chefs d'entreprises, dont Masayoshi Son, patron de Softbank, avec qui il aurait évoqué une entrée du géant japonais des télécoms au capital de Dailymotion, selon la presse.

En 2013 Stéphane Richard avait fait une autre tournée dans la Silicon Valley, approchant notamment Microsoft, pour tenter de trouver un partenaire américain à Dailymotion.

Mais une offre sur 75% de Dailymotion par Yahoo! avait été bloquée par Arnaud Montebourg, refusant de laisser filer une des rares pépites françaises avec un potentiel mondial.

Ce veto avait déclenché une large polémique sur le protectionnisme économique français et avait, pour certains patrons, porté un coup à l'attractivité de la France pour les investissements étrangers.

Dailymotion, une start-up lancée en 2005, est le site internet qui affiche la plus forte audience en Europe (selon Comscore) avec 128 millions de visiteurs uniques par mois.

Le site, qui existe en 18 langues et n'a pas encore atteint la rentabilité, a une forte présence en Turquie et en Asie notamment et ne réalise que 10% de son chiffre d'affaires en France.

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