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Pourquoi reprendre des entreprises avec des marques plutôt que sans ?

par Gilles Lecointre / EYROLLES






Dans la panoplie des données observées avec attention par les auditeurs qui se penchent sur la valeur d’une entreprise et ses chances de pérennité, il existe ce qu’on appelle les « immatériels ». C’est très important car ce type d’actifs extra-financiers est à l’origine des résultats économiques des sociétés (croissance et rentabilité).

Parmi ces actifs immatériels il y a en outre les « marques ». Tout le monde comprend ce qu’est une marque mais, en général, on estime que les marques sont l’apanage des grandes entreprises et concernent peu les PME-PMI. C’est une grossière erreur.

Essayons de comprendre pour quelles raisons une marque constitue un « bonus » pour une entreprise qui l’exploite et comment en créer une pour celles qui n’en n’ont pas encore ?


Je demandais un jour à des étudiants de me dire spontanément à quoi leur faisaient penser des marques créées par leurs camarades entrepreneurs. Nous avons alors constaté que le sens attribué à la majorité de ces marques était très éloigné de l’activité qu’elles étaient supposées représenter.
Est-ce grave ?
Dans l’absolu non, toutes les marques littéraires ou graphiques sont acceptables, avec une seule limite, celle de leur efficacité finale. A quoi sert en effet une marque ? C’est le premier signe de reconnaissance d’un produit, c’est la porte d’entrée par laquelle passe tout prospect. Dès lors, il faut être attentif à la manière dont une marque est perçue et comprise, faute de quoi on court le risque de passer à côté de son marché.

Pour éviter cette erreur, il n’existe que deux solutions. Ou bien on dispose de gros moyens financiers et on lance sa marque avec force campagne publicitaire sur les grands médias susceptibles de la faire connaître. Cette méthode a fait ses preuves et, en y mettant les moyens, on est quasi certain de déclencher la notoriété de toutes les marques, y compris les plus abstraites au départ.

Ou bien, le budget de communication possible est très limité, cas de la plupart des PME, et alors il convient de faire preuve de peut-être moins de créativité sur la forme mais davantage sur le fond. Cela veut dire qu’il faut imaginer quelque chose d’immédiatement intelligible par les consommateurs visés. Car la marque représente le premier véhicule de communication de l’entreprise à travers le papier à en-tête, les devis, les factures, les cartes de visite, le site internet, le standard téléphonique, les inscriptions sur toutes sortes d’annuaires ou de réseaux sociaux...
Dès lors comment s’y prendre pour construire une « bonne » marque ?

En fait, toutes les marques qui « fonctionnent » possèdent cinq propriétés :
  • Un caractère singulier
  • La signifiance
  • La référence au métier
  • La désignation de la cible
  • Le rappel du positionnement et de la fonction produit

Le caractère singulier d’une marque est indispensable puisqu’il définit l’unicité du label proposé. L’INPI permet de vérifier que ce critère est respecté. Mais au-delà du côté juridique, il faut aussi veiller à ce que la marque ne soit pas « banale », ce qui lui retirerait tout signe distinctif et attractif.
Je préconise ensuite et surtout que la marque soit « signifiante » c’est-à-dire qu’à sa lecture on comprenne immédiatement son champ de compétence. Cela ne veut pas nécessairement dire que le mot choisi figure dans le dictionnaire, ce peut être un mot inventé mais qui évoque spontanément quelque chose de concret.
Il est ensuite judicieux que la marque puisse évoquer plus précisément le métier qu’elle sous-tend et la cible qu’elle vise. Il est enfin souhaitable de pouvoir suggérer le bénéfice consommateur du produit.

La réunion de ces cinq critères est efficace parce qu’elle contracte en un seul flash le positionnement stratégique, c’est-à-dire l’identité complète du produit. Elle constitue de la sorte une mini campagne publicitaire en modèle réduit.

Mais ce « cinq en un » est-il réalisable ? Pour s’en convaincre, voici trois exemples récents de conception de marque qui ont été de grandes réussites. On peut observer qu’en moins de dix mots et sur deux lignes, on couvre le spectre des conditions requises : le produit, le positionnement et la cible sont déclinés de façon claire. Le graphisme (type de caractères, choix des couleurs et logo) complète le dispositif en soulignant l’univers de référence du produit.
Quand on agit en « marquant » ses produits de façon pertinente, on fait progresser ses ventes mais on donne aussi une valeur supplémentaire à son entreprise. Car disposer de marques originales dont la notoriété et l’image sont reconnues, constitue un atout immatériel de plus dans l’actif de ’entreprise. C’est si vrai que j’ai pu mesurer dans une enquête auprès de 1.000 PME qu’il y avait une différence de près de 2 points de croissance annuel du chiffre d’affaires entre les entreprises qui ont des marques « propres » et celles qui n’en ont pas.

Conclusion : soyez très attentifs à ces signes de reconnaissance de l’entreprise quand vous étudiez un dossier de reprise.




Qu’en est-il de la raison sociale d’une entreprise ?
Le problème de la raison sociale peut être abordé de façon identique à celui des marques produits. En effet, le nom d’une société représente bien souvent sa seule enseigne visible (surtout dans les TPE), tout simplement parce qu’elle n’a qu’un produit ou un seul service à proposer.
Dès lors il faut surtout éviter :
-la banalité
-la confusion
-la monoculture identitaire

La banalité c’est de se présenter comme la plupart de ses concurrents du même métier : « Imprimerie du Centre » ; rien ne donne envie d’en savoir plus !
La confusion, c’est par exemple d’intituler son entreprise de son nom de famille ou, pire, d’inventer un acronyme autour : par exemple Jacques DUPONT SARL, ou bien JDI SARL (comme Jacques DUPONT Imprimerie). Rien n’indique ce que l’entreprise fait, on peut tout imaginer, surtout ce qu’elle ne fait pas….. Par ailleurs, il n’est pas utile et peu judicieux de confondre son identité privée avec son identité commerciale. D’une part parce que, en tant que personne privée vous pouvez être porteur d’idées, de pratiques qui pourraient déplaire à certains de vos prospects et clients. Ensuite parce que l’entreprise est une personne morale dont l’existence ne doit pas si possible dépendre que d’une seule personne physique. Pour faire image, imaginez le jour où vous vendrez votre affaire. Si l’entreprise porte votre nom, et que vous allez la quitter, que pensera et que pourra faire le repreneur ?
La monoculture identitaire, est l’idée que la raison sociale ne porte qu’une seule corde métier à son arc. Supposez que le développement de l’affaire nécessite l’ouverture d’une nouvelle branche d’activité. Si la raison sociale stigmatise une seule spécialité, il sera nécessaire ou bien d’en changer afin d’élargir le spectre des compétences de l’entreprise et, vous risquez alors de perdre une partie de la notoriété déjà acquise sur l’ancienne dénomination. Ou bien de ne pas changer, auquel cas ce sera plus difficile de faire connaître la nouvelle activité.

Cette dernière remarque met en évidence l’avantage de ne pas « enfermer » l’entreprise dès le départ dans un carcan. Voyez « large ». Il faut pouvoir, à tout moment, ouvrir vers un changement souhaitable. C’est pourquoi, il est sage de bien distinguer la raison sociale, des marques de produits commercialisés par l’entreprise.

Vigilance aussi pour ceux qui créent une holding de reprise : au départ c’est une coquille purement financière et de peu d’intérêt pour le public et les clients. Mais cela peut évoluer dans le temps avec le rachat d’autres sociétés, la constitution d’un groupe qui lui aussi doit avoir sa « personnalité » propre.

Pour en savoir plus : https://www.eyrolles.com/Entreprise/Livre/gerer-son-entreprise-avec-succes-9782340034068
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Auteur : Gilles Lecointre
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